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8 avril 2018 7 08 /04 /avril /2018 18:45
Tior, C4, Krav Maga et autres self défenses (civiles ou militaires)

"C'est toujours en termes politiques que l'on doit penser l'outil militaire, ce n'est pas en termes moraux ou en termes de pathos"

"Deux choses menacent la pensée militaire et stratégique : le militarisme et l'anti-militarisme"

L. Henninger

 

Un sujet à la fois classique et hautement polémique : La self défense et le combat rapproché militaire.

Sont ils liés ? L'un est il plus efficace que l'autre ? Faut il avoir fait l'Armée pour être légitime à enseigner une self défense efficace ?

C'est un sujet pertinent car le combat militaire est lié avec les arts martiaux. Ce lien, d'après des sources concordantes (voir les posts précédents), n'est pas direct. Les arts martiaux et le combat militaire coexistent cote à cote mais ils sont trop différents, à la fois dans les buts et les moyens pour qu'il y ait entre eux plus que des passerelles. (Par exemple un certain Lyautey qui avait pensé à faire la jonction dans un article sur le "rôle social de l'officier")

C'est aussi un sujet compliqué à étudier : La plupart des personnes n'ont pas d'expérience du combat militaire rapproché et/ou d'expérience en parallèle dans les arts martiaux.

De plus devant le tabou existant dans la société sur le sujet de la violence, il est difficile d'avoir accès à des sources fiables, honnêtes et pertinentes.

Souvent la présentation de l'activité militaire est caricaturée (cf les films "Avatar", "Apocalypse Now", "Starship Trooper" ) ou exagérée ("Top Gun" et autres "propaganda" films)

En conséquence, Il est possible à divers mystificateurs de raconter plus ou moins des "histoires" sans que la plupart des pratiquants d'arts martiaux puisse apporter une contradiction.

Ils sont aidés en cela par certains pratiquants qui s'auto-intoxiquent : Demander à un aïkidoka ou à un pratiquant de taïchi chuan "lambda" de vous expliquer ce qu'est le combat rapproché militaire, c'est s'assurer de bons moments de rigolades .....

Un très bon exemple de ce problème de communication ?

Dans les "vestiaires" des arts martiaux (vestiaire physique, réseaux sociaux, etc.....), il y a beaucoup d'histoires d'artiste martiaux se faisant écraser au combat à mains nues par des instructeurs militaires au moment de leur incorporation (sur le modèle de l'adjudant Zim dans starship trooper, le film et le livre)

Inversement, à ma grande surprise, dans les "vestiaires équivalents" du milieu militaire (au moins français), circulent les histoires inverses où des pratiquants d'arts martiaux mettent une dérouillée à l'instructeur.

Bref deux milieux avec un fort point commun (la gestion de la violence - en particulier, mais pas exclusivement, pour les arts martiaux de self défense) mais étrangement où la réalité a du mal à apparaître. ("Ce qui est simple n'est pas forcément facile"). Là un cas d'école où le psychisme humain (qui interagit toujours fortement avec le mythe de la violence) prend le pas sur la simple réalité.

Un très bon article de PROTEGOR (une référence pour les pratiquants d'arts martiaux de self défense) a essayé de préciser ce qu'était actuellement le combat rapproché dans l'armée française (pour rappel, combat rapproché en anglais c'est "close combat" et en hébreu c'est "krav maga"). Pour cela, l'article essayait de donner un début de définition et d'explication sur le TIOR, le C4 et autres CTOM.

https://www.protegor.net/blog/2016/05/methodes-combat-mains-nues-armee-francaise/

Mais comme d'habitude dans les arts martiaux, certains essayent de s'arroger une place de référent et prétendent que rien n'est jamais révélé dans le combat rapproché militaire (Seulement par eux lors de leur stage.....) et qu'il est inutile de faire des recherches sur le sujet.

Bien sur, ce type d'individu ne propose en général que sa parole et quelques photos en treillis. (existe en version française, américaine, russe, israélienne, etc....)

A chaque fois, j'ai demandé une démonstration technique ou un support de cours quelconque - Profitons des réseaux sociaux, tant qu'ils existent. A chaque fois j'ai du silence (au mieux) et des insultes (au pire).

Afin de sortir de ce fantasme permanent dans les arts martiaux (enfin depuis quarante ans) et de pouvoir éviter que les prochaines générations du Wulin ( = communauté des artistes martiaux, c'est le terme chinois) soient victimes des mêmes miroirs aux alouettes, j'ai commencé à m'intéresser au lien existant entre l'entrainement au combat rapproché miliaire et aux art martiaux de self défense (la "self défense" incluant la self défense stricto sensu (la réaction à une attaque) et la partie combat rapproché (apparaissant après la dite réaction).

Ces deux disciplines étant les plus à même d'avoir des points communs. (mais si voulez faire ce type d'analyse avec l'Aikido- art martial cérémoniel- ou la boxe - art martial sportif, feel free ! )

Au début, j'avais une déclaration de Richard Douieb qui déclarait que les militaires étaient "médiocres" en self défense/combat rapproché (y compris dans les forces spéciales où quelques "rares" personnes pouvaient être spécialisés dans cet aspect et pouvaient être considérés comme valables)

https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-nos-vies-connectees/20101203.RUE9712/le-krav-maga-se-pratique-dans-un-esprit-sportif-clair-et-sain.html

Je me suis ensuite rendu compte ensuite que Richard "Huk" Planas du Kenpo Karaté avait dit la même chose dans un ancien article de Budo Magazine. Cet article m'avait interpellé sur un tas de points (notamment sur l'évolution des disciplines après le décès du fondateur/gérant- Ed Parker; sur le fait que ce n'était pas une discipline pour les enfants; etc ....).

A partir de ces déclarations, j'ai commencé à me documenter sur ce le "combat militaire rapproché" avec notamment :

- des discussions avec divers militaires ayant connu le "feu" à des distances "variées" (dont un "ancien" des forces spéciales françaises )

- Les textes réglementaires sur le C4 et le TIOR

- La consultation d'un peu de littérature sur le sujet

Merci à Michel Goya pour ses livres, son blog et ses commentaires, merci au magazine Guerres et Histoire, notamment l'article sur les parachutistes, merci à Jean-Dominique Merchet pour son texte sur les forces spéciales et bien évidemment merci à Laurent Henninger, mon mentor sur l'Art de la Guerre (même si c'est, au moins à l'origine, à l'insu de son plein gré. ) dont je recommande le moindre écrit et la moindre conférence. Oui, je sais, je suis une groupie mais je l'assume : -)

Au passage, d'autres personnes se sont proposées pour me fournir plus d'informations. Je suis désolé de ne pas avoir eu le temps de les solliciter malgré ma vive envie. Je tiens toutefois à les remercier pour leur proposition.

A partir de ces différentes sources, voici une petite présentation de ce qu'est le "combat militaire rapproché actuel" et de la relation qu'il devrait établir (je pense) avec les arts martiaux de self défense pour que les DEUX puissent rester "stables" dans le temps.

Accessoirement cela évitera à beaucoup de pratiquant de croire que leur pratique est "inutile" suite à des racontars de mythomanes ou de manipulateurs. La réflexion permet de cerner les aspects inutiles en combat réel et de connaître les limites d'utilisation, ce qui est plus utile que de vouloir les repousser sans arrêt plus loin : Pour rappel, la discipline de self défense n'est pas l'alpha et l'oméga des arts martiaux. C'est l'alpha et l'oméga pour les arts martiaux de self défense seulement. Inutile de transformer le Judo ou le Gouren, par exemple.

Bien évidemment, je me suis limité à la France dans mon étude/analyse. Toutefois à ma connaissance (et à celles de mes sources), c'est identique dans les autres armées. La réalité contraint tout le monde à faire la même chose. Quand il y a des différences, elles sont dues :

 - soit des contraintes différentes (et donc il est possible de les analyser et de comprendre pourquoi il y a des différences)

- soit il y a autre chose que de la "réalité basique". Or si l'idéologie est une bonne chose sur le plan politique (Si, si !), c'est un problème pour le combat rapproché où la vitesse des échanges interdit le débat "philosophique".

Toutefois, vu la complexité du sujet, si un élément du présent texte posait problème à quiconque, je suis tout à fait disposer à prendre en compte tout apport ou remise en cause documentée. (j'insiste sur l'aspect documenté ...... "Les paroles ne sont pas le territoire")

Le cadre étant posé, nous pouvons y aller.

D'abord un petit état des lieux.

Dans le passé (années 60), la pédagogie d'enseignement du close combat dans l'armée française, y compris pour les militaires des forces spéciales, étaient un peu "rustiques".

En gros :

- Quelques mouvements d'attaques étaient montrés dans la "caserne" (notamment ceux que l'on voit dans les manuels de "close combat", c'était vraiment les mêmes - aucune technique secrète, cachée, secret-défense, etc .....)

- Ensuite, il y avait une mise en pratique sur le "tas" dans certains endroits dont "chicago" (j'ai appris au cours des entretiens que "chicago" dans le milieu militaire français n'était pas la ville américaine mais un quartier de Toulon réputé, autrefois, pour son ambiance nocturne festive et "testosteronée".)

 

Bien évidemment, cet entrainement était suffisant pour faire face à un problème de combat rapproché simple (notamment au vu de la condition physique des militaires vis à vis du reste de la population et éventuellement d'autres armées) mais dès qu'un problème technique apparaissait (problématique de vitesse de réaction, de choix contradictoires, de manque d'information, etc ....) les carences devenaient évidentes. [Et oui, la self défense et le combat, c'est compliqué. Les techniques sont simples mais la mise en application fait partie des choses les plus complexes auxquelles peut réfléchir un humain... ]

C'est là, je pense, l'explication de l'appel, par divers militaires et autres polices d'intervention "musclées", depuis les années 1970-1980, à divers "civils" qui avaient approfondis les arts martiaux. (A l'époque, tous les arts martiaux se présentaient comme des arts martiaux de self défense....D'où la difficulté pour des "néophytes" de faire un choix éclairé au vu de l'évolution de certains disciplines)

Je sais qu'il est classique de reprendre l'argument de Henry Plée et de dire que Karaté, Judo, Boxe(s), sont des sports et n'ont aucune application réelle. Mais c'est un point qui peut être discuté.

Le capitaine Barril, par exemple, a introduit le Karaté au GIGN (d'après son livre et avec des photos à l'appui où le kimono est de rigueur)

De même dans un livre sur l'histoire du RAID (il me semble mais j'ai perdu la référence), il est mentionné l'entrainement aux arts martiaux et, au vu du manque de recul sur les difficultés techniques, l'un des membres de l'équipe allait en intervention avec un Bokken. (le sabre en bois).

Pour les deux derniers exemples, c'est un contexte constabulaire mais il se rapproche, sur l'aspect technique, d'un contexte de self défense militaire.

Dans son livre sur les points vitaux, Plée, lui-même contredit son assertion en mentionnant que son père a pu affronté les corps francs allemands pendant la 1ere guerre mondiale en utilisant la boxe française et l'escrime.

Bref dans les années 70/80, le manque de technique dans les forces spéciales et les forces d'intervention était évident. Ce fut d'ailleurs plus sans doute un problème de perte de savoir : la boxe française était, à une époque, reconnue dans les armées, le judo était également présent (à petite échelle) dans l'armée (bataillon de Joinville, remplacé aujourd’hui par le CNSD, qui servait de "réserve technique" à l'armée) AVANT la montée en puissance de la pratique civile.

Cette perte de savoir permanente au sein des armées (sauf quand une ou deux individualités s'y opposent) explique d'ailleurs l'appel régulier à des experts en "arts martiaux" au sein des forces policières d'intervention et militaires. De manière générale, à ma connaissance, le combat à mains nues n'est pas très considéré au sein de ces institutions. En général, le savoir technique et la tactique et surtout la stratégie (ou la politique) sont plus à l'honneur. Au passage, toutes les personnes que j'ai interrogé pour cette analyse m'ont confié que le savoir militaire se perdait actuellement au sein de l'armée. Quand à la motivation, elle est devenu très très faible (sauf unité d'élite, mais elles servent maintenant de "cache sexe")

Or, par rapport à l'époque où l'adversaire de l'armée française était une autre armée, les choses ont changés. Désormais le soldat est en contact avec la foule (vigie pirate, si tu m'entends.....), il est donc devenu nécessaire d'avoir un mode de réaction avec des attaques beaucoup plus rapprochées et d'avoir une vision claire de ce qu'il est possible de faire (ou de ne pas faire) pour sauvegarder les intégrités physiques (la sienne mais aussi celle de l'adversaire)

A partir de là, il y a eu mise en place d'un système de combat rapproché pour l'armée française.

C'est la naissance du TIOR (qui va remplacer le très basique "close combat")

Et là commence le drame ....

Comme l'a souligné de nombreuses fois Laurent Henninger, il y a une forte tendance à vouloir transformer l'armée française (une institution faite pour gagner des guerres) en une institution constabulaire (une force de police).

A ma connaissance, la confusion a commencée pendant le conflit en Yougoslavie (avec des sommations à faire en trois langues différentes avant de pouvoir ouvrir le feu .....).

[Aparté : Dans le film, la bataille d'Alger, ce problème est également mis en lumière, mais il existe un voile d'oubli sur cette période]

Depuis la tendance s'amplifie.

Le combat rapproché n'échappe pas à cette tendance générale.

 

Avec le TIOR, cet "esprit constabulaire" apparaît de manière flagrante à travers les techniques. Les responsables de ce programme (qui ne sont pas forcément les concepteurs) semblent vraiment vouloir faire en sorte que les soldats prennent le plus de risque possible : Comment un militaire peut il avoir l'usage d'une matraque télescopique ?

Il s'agit dans ce cas d'une tâche différente de celle d'un soldat. (A l'Armée, l'idée était plutôt d'utiliser le canon de l'arme et surtout la crosse en cas de "problème"). La matraque est un arme de policier pas de militaire.

Bien sur la réalité est apparu ("le TIOR n'est pas efficace") et alors une nouvelle discipline est apparue : Le C4 ( Combat Corps à Corps adapté au Combat de haute intensité ) censé être plus "offensif".

Là encore, à priori, il n'apparait difficile, au vu du programme présenté de croire ce qui est annoncé. ("Le C4 permet de neutraliser quelqu'un dans un contexte de guerre où tout est autorisé").

J'ai noté trois points révélateurs :

1- Le temps de formation dans les deux cas (TIOR et C4) est très (trop ?) court

 

Pour le TIOR le temps est : 32 heures + 32 heures + 78 heures (sur le plan technique), soit 142 heures,  si on suppose qu'un civil s'entraine 4h/semaines => Techniquement, par rapport au Krav maga c'est ceinture jaune. Et çà c'est le niveau technique d'un instructeur....

Pour le C4, c'est 22h+ 57h + 121 h = 200 heures. Là encore, c'est le niveau ceinture orange/vert.

Comme l'ont fait remarqué Richard Douieb et "Huk" Planas, le temps de formation de 10 ou 30 heures pour un soldat est complétement insuffisant pour intégrer des manières de faire efficace. C'est, au mieux, une initiation. Il est illusoire de croire qu'un militaire est formé au combat rapproché avec l'équivalent de 3 stages civils. Le combat militaire rapproché, ce n'est pas différent du combat civil, c'est juste une illusion d'efficacité portée par l'institution.

 

2- Le programme technique est (très certainement) incomplet (et la pédagogie aussi ! )

 

Là, c'est un aspect technique, il est donc nécessaire de s'y connaître un peu. (et ce genre de discussion est récurrent depuis des siècles dans les arts martiaux, donc je ne souhaite pas approfondir)

Mais déjà si on s'intéresse à la partie self défense "pure", elle est quasiment absente du programme du TIOR alors que cela devrait être la partie importante d'un programme de combat rapproché dans un cadre militaire.

Comme cela fut découvert par l'armée américaine aux prises avec une population civile (le texte où je parle du problème technique posé par les Moros à l'armée américaine dans les philippines - http://krav.philo.over-blog.com/article-la-self-defense-et-le-combat-militaire-121263060.html)

Pour le C4, je réserve mon jugement n'ayant pas eu accès à une présentation précise des techniques. Toutefois, la présentation faite dans les vidéos ne va pas, à priori, dans le bon sens.

RNO, un you tubeur, ex fantassin français, pointe le mauvais entrainement général aux armes à feu avec une pédagogie et un entrainement inadaptés aux conditions actuels d'un affrontement. Difficile de croire que si l'entrainement de base du fantassin est négligé (le combat à distance), un entrainement annexe (le combat rapproché) va être correct.

Autre point d'interrogation, le CTOM (Combat Total Operationnel Marine), lui serait dérivé du MMA (toujours l'article de PROTEGOR). Hors une des caractéristiques du MMA est de ne pas traiter l'utilisation d'arme blanche, ce qui génère des techniques très bonnes dans l'octogone mais dangereuses si, dans la rue, un couteau sort (au moment du clinch par exemple).

D'ailleurs le fait qu'il y ait deux disciplines différentes de combat rapprochés (CTOM et C4, le TAD serait proche du C4) au sein des forces militaires français est aussi un point d'alerte sur l'aspect technique. Pourquoi deux (trois ?) "écoles" différentes pour des techniques sur lesquelles il est impossible d'avoir une grande variabilité (cf Miyamoto Musashi)  ?

Il y a donc des éléments objectifs qui induisent un certain scepticisme sur l'efficacité technique proposée. (bien sur, cela ne veut pas dire que tous les militaires sont mauvais, cela veut juste dire que s'ils sont bons techniquement cela dépend d'eux, de leur formation antérieure et non de leur formation "professionnelle")

 

3- Le contexte du combat pris comme référence dans le TIOR  n'est pas un contexte de guerre où tout est permis. Le militaire est donc ramené à un combat civil mais sans la formation adéquate. (là encore, pour le C4, je manque d'éléments mais des éléments techniques me font douter)

C'est visible si on regarde la partie juridique du TIOR (objectif n°1 de la formation : Faire acquérir les base juridiques ..... p 9 de la circulaire). A quoi sert le juridique pour un militaire ? Certes, les conditions d'engagement sont variables mais ce n'est pas à un soldat de les adapter au contexte (Là, c'est typiquement le travail d'une POLICE même d'intervention- encore une fois c'est du constabulaire). C'est la hiérarchie qui doit donner un cadre clair et précis. (Sinon elle ne sert pas à grand chose : Un telex (pour les ordres) et un magasinier (pour la logistique) suffisent ....)

 

C'est d'ailleurs l'avantage énorme d'un militaire dans le combat rapproché. Avec le port de l'uniforme, Il ne peut y avoir de doute pour un civil sur la riposte auquel il s'expose en cas d'engagement. Un civil qui engage un militaire ne peut donc être traité que comme un agresseur déterminé (un tueur potentiel .....) et traité en conséquence sans que le militaire ne se pose de questions. Quand les deux combattants portent l'uniforme, la prise de décision est encore plus facile.

Par contre un civil (ou un policier "normal") ne sait pas si un combat va commencer. C'est d'ailleurs le seul avantage d'une "voyou" en mode agression par rapport à un pratiquant. Techniquement, à ma connaissance, le pratiquant lambda sera meilleur que la plupart des agresseurs, l'avantage du "voyou" est sur le plan de l'état d'esprit INITIAL (et éventuellement du matériel d'agression et de la présence d'une bande .....)

Au vu de notre contexte juridico-social, c'est l'éventuel agresseur qui décide du top départ du combat dans notre société. C'est un avantage énorme : Un pratiquant lambda (comme moi), voudra (devra ?) toujours reporter au maximum le combat et sera donc plus vulnérable à la première attaque. (Sauf si la prise de distance est possible, mais ce n'est pas toujours le cas)

Un militaire n'a pas ce problème. L'uniforme donne tout de suite le "la". Un agresseur "civil" ne pourra pas dire que la réponse a été trop violente. (Je sais, il y a "normalement" des consignes.....). Ce qui donne une grande simplicité sur la mise en place d'une riposte. Or démolir quelqu'un n'est pas "techniquement" difficile une fois que l'initiative et la distance ont été prises. J'ai déjà écrit un texte là dessus.

Là, l'introduction du juridique dans l'entrainement de base d'un fantassin, signale que l'on ne veut pas que les militaires fassent leur travail ("gagner le combat dans un contexte où tout est permis") ou alors "quelqu'un" veut que l'armée fasse un autre type de travail qu'un travail militaire. L'analyse technique serait sans doute encore plus éclairant mais les éléments présentés me semblent suffisamment probant.

Ces trois points sont les signes que le combat rapproché n'est pas compris institutionnellement dans l'armée française moderne pour le TIOR. (et cela rejoint l'analyse de RNO sur l'entrainement du combat à distance).

Pour le C4, je mets mon jugement en attente (même si j'ai des présomptions) mais le fait qu'il y ait une demande militaire pour l'entrainement au Krav Maga me fait penser que les mêmes problèmes existent aussi pour cette discipline.

Pour récapituler

Dans le cas du combat rapproché, les témoignages de divers militaires corroborent mon analyse technique. L'armée n'apprend rien en self défense, voire dévoie la discipline pour des raisons "inconnues".

De la même manière RNO recommande le paint ball si l'on souhaite acquérir le sens tactique, compétence fondamentale pour le fantassin. L'armée ne permet pas d'acquérir cette compétence. Sa vidéo est assez démonstrative. https://www.youtube.com/watch?v=IbG7J8JtaIM . Son témoignage corrobore ceux que j'ai obtenu de manière directe.

Michel Goya, dans un article de son blog, faisait aussi remarquer que son protocole pour contrer les tireurs d'élite à Sarajevo malgré son efficacité avait été oublié par l'armée en quelques mois.

A l'heure actuelle, une expérience militaire n'est donc plus significative pour acquérir une réelle compétence du combat fantassin (rapproché ou non).

Bémol : Les forces militaire d'élite sont un cas à part mais en ce qui concerne le combat rapproché, à ma connaissance, c'est également un apport extérieur et non une pratique interne qui explique la compétence (Pour les forces d'intervention de la police, c'est encore un autre point)

Les faits et les témoignages pointent tous la même chose: les civils ont plus de temps (de liberté et de connaissance) pour s'entrainer sur les points qu'ils jugent important et surtout ils peuvent réfléchir sur ce qu'ils estiment être le plus efficace. Il y a certes des menteurs/tricheurs/mythomanes dans le civil mais il y a aussi un large panel d'expériences diverses qui peuvent empêcher un dévoiement "discret" de l'apprentissage des compétences même de type militaire.

Si on se place sur l'acquisition d'une compétence individuelle, La pratique militaire du combat rapproché, dans les faits, ne vaut plus grand chose. La discipline militaire permet d'utiliser des machines de guerre extrêmes efficace (et c'est très bien sur le fond : Un hélicoptère de combat est très utile et plus efficace que 150 personnes à mains nues ou avec des batons. Mais bizarrement là aussi, le taux de disponibilité des appareils montre qu'il y a un problème de fond.....). Mais les "arts" du fantassins ont disparus.

Au passage, notez l'ironie d'un état, l'état français qui veut légiférer sur les arts martiaux, dont les arts martiaux de self défense, alors qu'il est incapable, en pratique, de créer ou de maintenir une telle discipline .....

En conséquence, si vous comptez entrer dans l'armée (ou si on vous y force, ce qui pourrait redevenir à l'ordre du jour... ) et si vous souhaitez vous entrainer de manière efficace sur le combat rapproché, il vous sera nécessaire de passer par la pratique des arts martiaux de self défense. C'est cela la vérité et non l'inverse.

D'après mon expérience et mes connaissances, le meilleur des arts martiaux pour la self défense est le Krav Maga.

Je précise le Krav Maga Civil (Même en Israël, Richard Douieb a confirmé que le temps d'entrainement des militaires au Krav était aussi faible qu'en France).

Il y a certes d'autres arts martiaux de combat "sans concessions" (et j'en ai pratiqué ou j'en pratique certains) mais, en général, ils sont spécialisés ce qui est un problème pour une pratique de self défense où tout peut, potentiellement, arriver.

Je pense que n'importe quel militaire un peu expérimenté voit l'avantage du krav maga. D'ailleurs même le TIOR et le C4 disent s'en être inspirés. Pourquoi ne pas l'avoir pris ? Si le GIGN l'a adopté, c'est qu'il y a une raison.

Le problème vient, sans doute, du fait qu'il y avait peu de formateurs corrects. Cela change avec le travail de fond de la FEKM. (Par contre, bien évidemment, il serait peu judicieux de se rapprocher d'instructeur FFK, garantie "100% état français", où divers facteurs pervertissent la discipline - cf ci dessous).

Il y a également quelques mythos qui utilisent le nom sans avoir de légitimité, qui utilise le terme Krav-quelquechose ou Kapap en prétendant que c'est "mieux" que le Krav Maga. Là aussi, une simple étude historique démonte ce discours.

Enfin, bien évidemment, il y a la connotation israélienne.

Bien évidemment , il ne s'agit pas de nier qu'ils puissent y avoir des intérêts "occultes" dans les arts martiaux. Ainsi, ce fait a été documenté pour le Taekwondo (encore une fois le site Kung Fu Tea est à l'honneur). De même ce point a été mentionné pour les arts martiaux japonais par Henry Plée dans ses chroniques (il mentionne notamment que les experts japonais allaient tous régulièrement à l'ambassade du Japon pour "discuter").

Donc soyons clair, les arts martiaux ne sont jamais "innocents", c'est prouvé avec des faits et des témoignages. (au passage, même si ce n'est pas dans les arts martiaux "stricto sensu", revoir l'histoire du ministère de la "culture" en France, nous incite à ne pas jeter la pierre aux autres)

Mais paradoxalement le "conflit médiatique" sur la légitimité d'Israël (qui, comme d'habitude, est du à une instrumentalisation politique abusant de la pensée reptilienne, mais passons pour le moment car cela nécessitera un long développement. C'est l'inconvénient du néo cortex, il faut du temps) a aboutit à avoir un positionnement explicite de la FEKM sur l'absence de politisation et d'instrumentalisation. (cf l'article de R Douieb pour l'aspect public. En interne, je peux en témoigner, le discours est EXACTEMENT le même : Pas de politique, pas de religion)

Nous avons donc un art martial qui est critiqué pour la politique d'un pays auquel il est - encore -  lié (mais dont il n'en est pas originaire, je rappelle que le Krav Maga est avant tout l'œuvre d'un homme, Imi Lichtenfeld, d'origine Tchécoslovaque voire austro-hongrois au moment de sa naissance) alors qu'il est porté à l'échelle mondiale par la seule fédération qui explicitement refuse toute instrumentalisation. (Là encore, c'était le vœu du fondateur et, par ailleurs, c'est dans la définition d'un art martial).

La preuve ? : il n'existe pas d'organe centralisateur du Krav Maga en Israël qui gérerait la "marque" krav maga. (Je pense que c'est un voeu du fondateur - Certains devraient y penser pour l'avenir ....). Le Krav Maga est donc originaire d'Israël (si on "oublie" que Imi a commencé sa réflexion à Bratislava) mais il est maintenant indépendant et autonome d'Israël.

La plus grande fédération mondiale est d'ailleurs en Europe, avec la France en leader. C'est normal, la France est le pays des arts martiaux. (merci à Léo Tamaki !)

Mais le paradoxe n'est pas fini. Certaines personnes considérant que le Krav Maga n'est qu'une franchise commerciale sont dans la démarche exactement inverse et veulent lier de manière définitive le Krav Maga, Israel et la religion juive en appuyant à fond sur une revendication identitaire pour avoir des "clients captifs".  Et moins, elles sont performantes sur le plan technique (notamment par rapport à la FEKM et il s'agit de faits, cf vidéos de démonstration  sur ce blog) et plus elles sont attachées à militer sur ce aspect.

C'est d'ailleurs exactement, le genre d'expert que la FFK (anciennement FFKDA, la fédération actuellement délégataire pour le krav maga dit "krav-raté" par les connaisseurs) invite pour essayer de maintenir l'illusion d'une légitimité du Krav Maga...... Qui pour demander des comptes à la FFK sur cette instrumentalisation publique ? Ceci en plus de la création de compétition de Krav Maga (contre l'avis du créateur qui avait expliqué pourquoi c'était une aberration .....) montre bien que le Krav Maga ne peut se permettre d'être seulement présent dans le milieu sportif s'il veut rester ce qu'il est : une self défense sans aucun a priori politique, religieux ou autre.

Un ménage doit être fait au vu de la déviance de la FFK (et de quelques négligeables mythomanes) MAIS il ne peut être fait en s'appuyant uniquement sur une fédération sportive nationale tiraillée par des forces "occultes".  

En résumé, les militaires (fantassins) devraient s'entrainer aux arts martiaux CIVILS de self défense (et en particulier au Krav Maga dans la FEKM) s'ils souhaitent avoir une vraie compétence dans le "combat rapproché militaire". (qui devrait inclure, en théorie, majoritairement la self défense mais entre la théorie et la pratique...). La discipline institutionnelle est plus un passage diplômant qu'une réelle acquisition de compétence.

Ceci dit, c'est une véritable épreuve. Le parcours que l'on voit sur la vidéo ci dessous ( a partir de 0.50) est éprouvant, même si le spectaculaire est absent. Toute personne qui le réussit peut légitiment être fière d'elle.

 

 

Mais il y a plus : Établir une passerelle entre les militaires et les arts martiaux de self défense serait bénéfique, au delà des individus, pour les institutions qui les portent.

 

Pour l'institution militaire, il y aurait accès à une discipline "purement technique" où aucun impératif "politique" ministériel (dans le sens péjoratif du terme) ne vient parasiter l'analyse et/ou l'apprentissage d'une méthode de combat. (attention pour éviter le dévoiement en milice ou en étape de recrutement militaire pour les jeunes, l'héritage de Shaolin est à maintenir et à respecter dans les arts martiaux y compris, voire surtout, pour les militaires)

 

Pour le Wulin et les arts martiaux de self défense, cela permettrait d'avoir un point d'entrée avec l'Armée, une institution indispensable à la société, (c'est Machiavel qui le dit) qui puisse lui permettre :

 

1- d'être protégé d'influence politique "parasitante" (par exemple un ministère des sports voulant transformer les techniques pour des raisons socio-politiques)

2- D'avoir accès à des ressources (salle d'entrainement municipale, représentation officielle,....) en tant que conservateur d'un savoir précieux, un genre de CNSD "civil". (Au passage, les femmes pourraient être très impliqué sur cet aspect, ce qui ferait un pendant aux hommes, détenteur de l'institution militaire)

Il faut donc institutionnaliser l'aspect self défense en France en dehors du ministère des sports (le lien est néanmoins nécessaire pour éviter de devenir un entrainement milicien et/ou perdre le contact indispensable avec les autres arts martiaux) . Pour le futur, il apparait nécessaire de créer des liens institutionnels avec le monde de l'Armée voire du constabulaire et de leur ministère respectif afin de maintenir, à travers un équilibre très très très délicat (c'est là LE point), la transmission des techniques de self défense dans le temps.

Ce fut le point qui n'a pas été réussi par le Karaté en Occident ET en Orient (mais là l'instrumentalisation fut d'une autre nature cf Henry Plée et J. Sapir).

A nous de tenter quelque chose de plus construit (en s'inspirant de la grande stratégie de l'Empire Byzantin, du monastère Shaolin et d'autres exemples historiques, comme guide pour réussir cette mutation des arts martiaux dans un monde en dislocation).

C'est tout à fait possible. Le Judo a eu un stratégie de neutralité vis à vis de tous. C'est ce qui a permis à un art martial japonais de continuer son développement après guerre alors que le Japon "gempeitai" avait été un allié de l'Allemagne Nazie.

Le Krav Maga et les autres martiaux de self défense "réelle" (j'ai la liste :-) ) doivent suivre la même stratégie avec les deux axes principaux classiques pour guider l'action du Wulin :

- Non violence en tant qu'artiste martiaux

- Neutralité vis à vis du monde politique, religieux, etc .....

 

 

Le Coin culture

 

Pour un sujet aussi sérieux que la puissance militaire et son expression dans une civilisation, il faudra au moins deux œuvres.

 

 

 

 
 
Tior, C4, Krav Maga et autres self défenses (civiles ou militaires)

La première "Etoiles, Garde à vous" de Robert Heinlein.

Une description, à travers un récit de science fiction, du milieu militaire et de sa relation avec le politique. Même si n'êtes pas fana de récits de guerre, il vous intéressera : Il y a relativement peu de description de bataille, c'est beaucoup plus une réflexion sur le soldat et l'Armée.

Il est à noter que le livre est à l'opposé du film "starship trooper"  qui lui est une satire du militarisme, notamment dans sa boursouflure américaine actuelle.

 

Certains ont, néanmoins, vu dans ce livre une œuvre prônant une militarisation de la société, ce n'est pas mon point de vue.

Il y a plutôt à mon sens un déploiement "inverse" de l'idéal du citoyen-soldat cher à Machiavel : Ce ne sont pas les citoyens qui sont tenus au service militaire, ce sont les volontaires au service militaire qui sont considérés comme citoyens.

Ce court extrait à mon sens montre d'ailleurs bien que, dans cet œuvre,  le "Militaire" (au sens noble) doit, dans toutes circonstances être inféodé au "Politique" (toujours au sens noble).

extrait :

"La guerre, ce n'est pas seulement le meurtre et la violence. C'est la violence contrôlée dans un but précis. Ce but est de soutenir les décisions de ton gouvernement par la force, et non pas de tuer l'ennemi simplement pour le tuer. Il faut l'amener à faire ce que tu décides. Tu vois : Pas de meurtre, mais un usage mesuré et contrôlé de la violence. Mais ce n'est pas à toi ni à moi de décider de cet usage et d'opérer ce contrôle. Un soldat ne doit jamais décider quand, où , comment et pourquoi il se bat. C'est le rôle des hommes d’État, des généraux. Les hommes d’État décident pourquoi et combien. A partir de là, les généraux nous disent où, quand et comment. C'est nous qui fournissons la violence. Ce sont les autres - qui sont plus vieux, plus sages, comme ils disent - qui la contrôlent. Et c'est bien comme ça. "

D'ailleurs Napoléon lui même disait qu'au final, le "Politique" gagnait toujours. Alors pourquoi perdre du temps et des ressources ?

 

Cette œuvre représente le cote lumineux de l'aspect militaire.


 

Tior, C4, Krav Maga et autres self défenses (civiles ou militaires)

Pour le cote obscur de l'aspect militaire, même si le film "starship trooper" peut tout à fait servir de support , c'est le livre "Capitaine Conan" de Roger Vercel, que je retiens (là le film de B. Tavernier est vraiment un reflet du livre) pour plusieurs raisons :

 

  • On voit les ravages du combat militaire et de l'entrainement à l'échelle individuelle (un peu comme dans le "Full Metal Jacket" de Stanley Kubrik)
  • C'est un militaire de réserve  (ayant fait Saint Cyr) qui m'a fait découvrir ce livre et le personnage du capitaine Conan lors d'une conférence. Je n'ai jamais pu le remercier de ce précieux apport (parmi d'autres), c'est l'occasion de le faire même si c'est de manière anonyme. (je ne peux que comprendre ce point :-) )
  • J'ai pu constater la réalité du devenir des personnages du type du capitaine Conan dans les personnes que j'ai côtoyé pour écrire ce texte (pas toujours, notez bien, mais souvent).
  • C'est le livre qui m'a fait sortir du mythe du "guerrier" si populaire, à tort, dans les arts martiaux.  (Conan se prétend être un "guerrier" et non un soldat, on voit le résultat ....)
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Published by KRAV MAGA et PHILOSOPHIE